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Bilan élections fonction publique : tentative de synthèse CGT

Concernant les résultats des élections dans la fonction publique de décembre 2014, nous avions déjà publié une analyse détaillée faite par Baptiste Talbot, sur la fonction publique territoriale. L’article ci-dessous est paru dans Fonction publique, publication de l’Union générale des fédérations de fonctionnaires (UGFF) CGT (les articles ne sont pas signés dans cette publication). Il tente une synthèse plus générale, et sans faux fuyant sur les résultats (« un signal adressé par les électeurs« ),  sur les trois versants de la fonction publique : Etat, territoires, hôpitaux.

 

1-Logo-UGFFL’HEURE DES BILANS

Les résultats nationaux des élections générales dans la Fonction publique sont maintenant connus et le temps est venu des premiers bilans.
En se penchant sur les résultats globaux, outre les évolutions de l’abstention et des bulletins nuls déjà notées dans le dernier numéro de FP, quelques grandes tendances peuvent d’ores et déjà être relevées. Faute de place, nous n’aborderons ici que deux questions qui sont d’évidence posées par ces résultats : la représentativité syndicale et le score de la CGT.

  •  REPRÉSENTATIVITÉ SYNDICALE, DES CRITÈRES A REVOIR

Pour l’ensemble de la Fonction publique, les 3 confédérations CGT, CFDT et FO totalisent 61 % des voix (62% en 2011, 57,7% en 2008) soit 7,5 point de moins que dans le secteur privé. Si on ajoute les scores de l’UNSA (10,4%), de la FSU (7,9%) et de SOLIDAIRE (6,8%), 6 organisations syndicales cumulent plus de 86% des suffrages. Cependant, du fait du mode de composition du Conseil Commun, 3 organisations syndicales (CFTC, CGC, FAFP) dont le score avoisine les 3%, conservent leur représentativité. Seul le syndicat autonome des directeurs d’hôpitaux (moins de 0,3% en 2011) perd son siège au Conseil Commun. Dans le secteur privé, où le seuil de représentativité est fixé à 8%, il n’y a que 5 organisations (CGT, CFDT, FO, CFTC et CGC) qui peuvent participer à des négociations au niveau national. Par ailleurs, le paysage syndical est nettement contrasté suivant les versants de la Fonction publique. A l’Hospitalière, les 3 grandes confédérations totalisent 80% et il ne reste que 5 organisations représentatives (CGT, CFDT, FO, SOLIDAIRE et l’UNSA). Dans la Territoriale, la situation est très comparable puisque ces 3 Confédérations totalisent 70% et qu’il y a également 5 organisations représentatives (CGT, CFDT, FO, UNSA et FAFP).
Dans la Fonction publique de l’Etat, les confédérations CGT, CFDT et FO cumulent moins de 45% de voix et 5 organisations (FO, FSU, UNSA, CFDT et CGT) se situent entre 13 et 17%. Avec SOLIDAIRE (9%) et la CGC (5,5%) il y a aujourd’hui 7 organisations syndicales représentatives dans la FPE puisque la CFTC perd son siège au CSFPE. Cependant, si on examine la situation dans le détail, on relève que seules la CFDT, la CGT et l’UNSA sont effectivement représentées dans la quasi-totalité des ministères. De plus, certaines organisations, dont le score est inférieur à 5%, ne doivent leur présence dans un CTM que par le truchement de listes communes à 2 ou 3 syndicats.
Si l’on constate ainsi que la loi de juillet 2010 n’a eu que des conséquences marginales sur la représentativité dans la Fonction publique, il n’y a pas lieu de s’en réjouir. L’émiettement syndical ne profite en rien aux agents et, dans le passé y compris récent, les autorités gouvernementales ont su habilement jouer des dissensions syndicales pour faire passer leurs projets. Ainsi, dans la dernière mandature, il n’a jamais été possible de réunir un vote « unanimement contre » des représentants du personnel au Conseil Commun alors même que les accords de Bercy obligent, dans ce cas de figure, le Gouvernement à organiser une nouvelle délibération.
D’évidence, il faut revoir les textes d’application des accords de Bercy pour réviser les critères permettant à une organisation syndicale d’être représentative dans la Fonction publique.

  • LE SCORE DE LA CGT : UN SIGNAL ADRESSE PAR LES ELECTEURS
  • Comme les observateurs l’ont souligné le fait marquant du scrutin du 4 décembre c’est le recul enregistré par la CGT dans pratiquement tous les secteurs.
    Si nous devons regarder lucidement ces résultats, il ne s’agit pas non plus de tomber dans le catastrophisme.
    Au niveau du Conseil commun, la CGT, avec 23,08% des voix et 8 sièges sur 30, demeure la première force syndicale dans la Fonction publique devant la CFDT (19,27% ; 6 sièges) et Force Ouvrière (18,59%, 6 sièges). Si la CGT recule de 2,36 points et perd un siège par rapport à 2011, elle obtient un score légèrement amélioré (+0,4) par rapport aux élections de 2008.
    Dans la FPT et la FPH, la CGT demeure première organisation syndicale largement devant ses suivantes. Dans la Fonction publique de l’Etat, la situation semble plus problématique puisqu’à 13,43%, la CGT rétrograde en 5ème position, notre recul étant de -2,4 point par rapport à 2011 et de -1,8 point par rapport à 2008.
    Toutefois, ces données brutes ne reflètent pas parfaitement l’évolution de notre audience. Sur les 6 dernières années le corps électoral de la FPE a été profondément modifié avec des suppressions massives d’emploi notamment à la Poste et France Télécom (-85000), la prise en compte nouvelle des agents de l’Enseignement privé sous contrat (141 000 électeurs) et une nouvelle vague de transferts (50 000) des agents d’exploitation du ministère de l’équipement vers les collectivités territoriales. Si on exclut ces trois secteurs des comparaisons, le score de la CGT est en baisse de 2,2 point par rapport à 2011 mais en progression de 1,4 point par rapport à 2008.
    Si recul il y a, ce n’est donc pas un effondrement de l’audience de la CGT parmi les agents de la Fonction publique.
    Ce revers constitue néanmoins un sévère avertissement qui nous est adressé par les électeurs et il conviendra de prendre le temps, dans toutes nos organisations, pour en analyser les causes qui sont sans doute plurielles.
    Si on écarte l’effet des « affaires Lepaon », en voie de règlement, il nous faut d’abord nous interroger sur notre capacité à être à l’écoute des salariés et sur les moyens que nous mettons en œuvre pour répondre à leurs revendications. Sur la dernière période la CGT, dans la Fonction publique, comme dans le reste du monde du travail, n’a pas su susciter des mobilisations d’un niveau suffisant pour faire barrage aux politiques d’austérité et pour imposer d’autre choix. Courant 2013 et 2014, les appels réitérés à des journées de grèves, dans des périmètres unitaires variables, n’ont pas été suivis massivement par les personnels ce qui nous questionne sur la lisibilité de notre stratégie et de nos modalités d’action.
    Ce constat, qui traduit notre difficulté à emporter la conviction des agents, nous force à réfléchir sur nos modes d’expression et de communication. Il nous interroge sur nos modes d’organisation et de fonctionnement ; à titre d’exemple, le score de la CGT dans les Directions Départementales Interministérielles (-0,4%, -7,3 point par rapport à 2011) montre que dans ce secteur notre outil syndical, éclaté entre 12 syndicats nationaux, n’est plus adapté aux réalités d’aujourd’hui. Plus profondément, se pose à nous la question des rapports entre syndicalisme et politique, singulièrement lorsque ce ne sont pas des partis de droite qui sont au pouvoir.
    Ce travail d’analyse, que nous devons mener dans les prochaines semaines et les prochains mois, doit nous permettre de redresser la barre pour, d’ici 4 ans, retrouver la confiance d’un maximum de nos collègues de travail.

Représentativité syndicale et loi de 2008 : on n’a pas fini d’en parler !

L’Institut de recherches économiques et sociales (IRES), dont il est assez souvent question sur ce blog,  est un organisme « au service des organisations syndicales représentatives des travailleurs » et « il a pour fonction de répondre aux besoins exprimés par les organisations syndicales représentatives dans le domaine de la recherche économique et sociale ».

Nous publions ci-dessous l’introduction, le sommaire et le lien d’accès d’un rapport de recherche menée sur l’influence de la loi du 20 août 2008 sur les relations professionnelles dans les entreprises et commandée par la CGT.

Il faut rappeler aussi, sur ce même thème, le travail coordonné par Sophie Béroud (maître de conférences de science politique à l’université Lumière Lyon-2)  et Karel Yon (CNRS-CERAPS, Université de Lille) pour la DARES, avec Marnix Dressen, Cécile Guillaume, Maïlys, Gantois, Donna Kesselman et Jean-Michel Denis, qui n’est étonnamment pas cité dans ce rapport de l’IRES. Deux rapports ont été publiés en 2011 et 2013 et sont librement téléchargeables ici et ici

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Cliquez pour avoir la totalité du texte : loi_2008_rapport-2

L’influence de la loi du 20 août 2008 sur les relations collectives de travail dans les entreprises- Enquête sociologique et analyse juridique

par Adelheid Hege (responsable scientifique), Aurianne Cothenet, Josépha Dirringer, Christian Dufour, Marcus Kahmann
septembre 2014

INTRODUCTION

La loi du 20 août 2008 « portant rénovation de la démocratie sociale » modifie en profondeur les règles d’accès à la représentativité syndicale. Son objectif est de consolider la légitimité du pouvoir de représentation exercé par les syndicats de salariés, tout particulièrement dans le cadre de la négociation collective. Dans les entreprises, la mobilisation électorale des salariés décide, pour chacune des organisations en lice, de la possibilité d’accéder, ou non, au statut d’acteur de la négociation collective comme à la qualité de syndicat autorisé à signer (ou à contester) des accords collectifs. De mauvaises performances électorales risquent d’écarter du jeu de la représentation collective qui cesse de garantir la pérennité institutionnelle antérieure. La « clarification » qu’apportent les nouvelles techniques de détermination de la voix légitime à exprimer les intérêts des salariés est mise en avant par les services du ministère du Travail : « La loi du 20 août 2008 a transformé en profondeur la représentativité syndicale en la fondant sur des critères rénovés, objectifs et appréciés périodiquement » (ministère du Travail, 2013 :194). Du côté des partisans comme des opposants de la réforme de la représentativité syndicale issue de la position commune Medef – CGPME – CFDT- CGT, des changements significatifs ont été anticipés en ce qui concerne la présence syndicale dans les entreprises, la conduite des négociations collectives, les modes d’organisation des échanges entre les acteurs.

Quels changements imputables à la loi de 2008 peut-on observer dans l’exercice de la représentation collective et dans les rapports collectifs du travail dans les entreprises ? La consécration électorale vient-elle conforter la légitimité représentative et négociatrice des équipes syndicales ? L’élimination des voix très minoritaires rend-elle plus fluide et plus percutant le dialogue social local ? Des mécanismes de validation plus transparents des acteurs syndicaux sont-ils en mesure de donner un nouveau souffle à la négociation collective ? Un double travail d’investigation mené dans le cadre de l’IRES pour l’Agence d’objectifs de la CGT devait fournir des éléments de réponse à ces questions.

Une enquête sociologique et une étude juridique ont été menées en parallèle entre 2012 et 2014 par deux équipes de chercheur(e)s. Il s’agissait de mieux comprendre les stratégies des acteurs dans les entreprises à un moment où la loi avait déjà produit des résultats : des premiers cycles électoraux avaient eu lieu sur les sites de travail et leur agrégation devait fonder, au cours de la recherche, la détermination de la représentativité des organisations sommitales.

Les deux études réunies dans ce rapport ont des objets différents ; elles se distinguent par le champ étudié comme par les exigences méthodologiques propres à chacune des deux disciplines. L’étude sociologique repose sur des enquêtes empiriques menées auprès d’acteurs syndicaux et d’employeurs dans des établissements de grande et de petite taille. L’étude juridique consiste dans l’analyse d’accords collectifs de droit syndical. Les panels étudiés, construits indépendamment et sans prétention de représentativité dans l’un et l’autre cas, sont d’ampleurs inégales : centré sur un petit nombre de groupes français ou internationaux dans le cas de l’étude juridique, plus étendu et construit pour approcher la diversité des configurations syndicales et des modes de gestion des relations sociales dans le travail sociologique. Le groupe est le niveau d’exploration dans la recherche juridique, l’établissement sert de porte d’entrée à l’analyse sociologique. Pour cette dernière, il s’est agi d’appréhender le jeu des acteurs dans un contexte de transformations multiples : quelle est l’empreinte de la loi de 2008 sur les relations entre représentants et salariés, et entre représentants et employeurs ? L’étude juridique s’est intéressée à la façon dont l’injonction législative oriente (ou non) la production normative dans les entreprises : comment les acteurs s’emparent-ils des dispositions de la loi ? Les deux rapports offrent ainsi deux éclairages distincts sur des problématiques spécifiques liées à la capacité transformatrice, potentielle ou réelle, de la loi.

Les deux études toutefois entrent aussi en résonance de sorte que, au-delà de la différence des objets, elles livrent un regard croisé sur les modes d’appropriation de la loi de 2008 par les acteurs dans les entreprises.

Par précaution méthodologique, les deux études cherchent à situer la période qui s’ouvre avec l’entrée en vigueur de la loi dans une perspective temporelle plus longue. L’étude juridique procède à la comparaison d’accords de droit syndical conclus, dans les mêmes entreprises, avant et après l’entrée en vigueur de la réforme. L’approche sociologique consiste à entendre syndicalistes et dirigeants d’entreprise dans l’objectif de recueillir les appréciations qu’ils font plus généralement des évolutions observées dans leur environnement, économique, social, institutionnel, syndical. Les chercheurs retournent dans des entreprises déjà visitées dans le cadre d’études dédiées à des champs connexes dans les années 1990 et/ou 2000 (un tiers du panel sociologique).

Les articulations à l’intérieur des systèmes de représentation dans les entreprises retiennent également l’attention des deux équipes. Elles sont susceptibles d’être affectées, au-delà de l’action de la loi, par la densification des agendas de négociation collective d’entreprise sous impulsion étatique. Comment se comparent les statuts et moyens dédiés aux représentants syndicaux centraux chargés des responsabilités de négociation, et le rôle dévolu, dans les accords de droit syndicaux, aux représentants « de base », dont l’élection sur les sites du travail décide de la représentativité syndicale ? Quel intérêt y est porté aux « autres » tâches représentatives incombant aux équipes syndicales (DP par exemple) qui échappent au champ de la négociation collective, pierre angulaire de la réforme de la représentativité syndicale ? D’un point de vue sociologique, il est crucial de comprendre où prend naissance le pouvoir représentatif. La contribution des salariés à la légitimation de leurs représentants s’épuise-t-elle dans l’acte du vote, souvent quadriennal ? La participation à la négociation (obligatoire) peut-elle être considérée comme l’élément organisateur du rôle représentatif qu’exercent les délégués à l’encontre de leurs mandants, et comme l’épicentre de leur pourvoir représentatif ?

Les deux études dessinent ainsi un champ de tensions, dans lequel se confrontent, d’une part, les légitimités locales et centrales de la représentation collective, les unes construites dans l’établissement, les autres instaurées au sommet de l’entreprise, et, d’autre part, les légitimités dérivant de tâches spécialisées (négociation collective) et celles produites dans l’exercice des rôles généralistes de la représentation syndicale (la « représentation au quotidien » ; Dufour, Hege, 2002). Cela soulève la question de l’autonomie que sont en mesure de faire valoir les collectifs syndicaux qui cherchent à déterminer eux-mêmes le centre de gravité de leur action, dans un contexte ou pouvoirs étatiques et patronaux se montrent activement investis dans l’écriture des agendas représentatifs. L’un des paradoxes de la réforme de la représentativité syndicale, et non le moindre, pourrait être que la légitimité représentative se décide dorénavant dans un espace (le site du travail) que la loi désigne (entre les lignes) comme étant le moins stratégique dans l’édifice de la représentation. Quelle sera dès lors la motivation des équipes syndicales locales à persévérer dans l’exercice et celle de leurs mandants à participer à la construction de la représentativité de leurs mandataires ?

Dans ce rapport, les deux études sont présentées successivement. Elles peuvent se lire indépendamment l’une de l’autre. Mais chacune contient des éléments de cadrage susceptibles d’éclairer l’approche opposée. Ensemble elles livrent une compréhension plus globale des évolutions du système de représentation collective des salariés. Dans sa première partie, l’étude sociologique met en perspective historique les mécanismes de reconnaissance de la représentativité dans un système dual français marqué par un interventionnisme étatique appuyé, et la transformation du statut qui y est reconnu au principe électif. L’étude juridique précise, en première partie, les transformations opérées avec le passage de la représentativité présumée à la représentativité prouvée et l’étendue des compétences reconnues aux acteurs d’entreprise pour négocier en matière de représentation des salariés et de droit syndical.

Les auteur(e)s de ce rapport tiennent à remercier les interlocuteurs qui leur ont ouvert l’accès aux sources conventionnelles et ceux/celles qui ont été prêt(e)s à leur consacrer du temps lors des visites d’entreprises. Ils remercient également les membres du comité de pilotage qui a accompagné la recherche et a permis, en cours de recherche, l’échange entre les deux équipes.

SOMMAIRE

Première partie Les pratiques des acteurs après la loi de2008 : résultats d’une enquête sociologique

Adelheid Hege (IRES), Christian Dufour (CRIMT), Marcus Kahmann (IRES)

I. Représentativité syndicale, quelle problématique ?
I.1. La loi de 2008, une balise dans un processus de transformation de long terme ?
I.1.1. La comparaison internationale et la représentativité syndicale en France
I.1.2. Un dualisme français mal reconnu, la permanence polymorphe de la voie électorale
I.1.3. De l’addition de voix locales à une représentativité nationale et de ses risques
I.1.4. Un système au caractère étatique renforcé, pour la promotion de la légitimité syndicale ?
I.2. Approche méthodologique de l’enquête de terrain
I.2.1. Les questions posées
I.2.2. Méthodologie
I.2.3. Le panel et ses caractéristiques

II. Quelles légitimités représentatives? Résultats de l’enquête empirique
II.1. Une loi qui produit des effets visibles
II.1.1. Les éliminations de syndicats
II.1.2. Des éliminations difficiles à accepter, même pour les délégués restants
II.1.3. La représentativité, avec ou sans quorum
II.1.4. Les moyens syndicaux revisités
II.2. Une loi peu visible dans les priorités des équipes
II.2.1. Une loi faite pour ailleurs et qui borne des pratiques anciennes
II.2.2. La négociation, objet contraint, objet dépassable (ou non)
II.2.3. Des pratiques évaluées plus globalement
II.3. La loi de 2008 et l’agenda des acteurs externes
II.3.1. Les syndicats territoriaux : soutien aux équipes et intermédiation institutionnelle
II.3.2. Les Direccte, promotion de la négociation obligatoire et du dialogue social
II.4. De l’autre côté de la loi, des interrogations sur la représentativité « réelle »
II.4.1. La reproduction incertaine des représentants
II.4.2. Les relations avec les syndicats sous le signe de l’autonomie et de l’incertitude
II.4.3. Les directions juges de la représentativité de terrain des équipes syndicales

III. Conclusion : des acteurs et des mandants
III.1. Les services décentralisés de l’Etat
III.1.1. Les sections : contrôle et promotion
III.1.2.Les niveaux régionaux plus centralisés : le dialogue social comme service d’Etat
III.2. Les employeurs et la loi : pour avis conforme
III.3. Les organisations syndicales
III.3.1. Les unions syndicales périphériques : le coeur de l’enjeu ?
III.3.2. Les délégués : leur reproduction – déjà menacée – n’est pas confortée par la loi
III.4. La construction de la relation syndicale et sa base

Deuxième partie L’influence de la loi du 20 août 2008 sur l’exercice du droit syndical d’entreprise : étude juridique empirique de quelques accords de droit syndical

Aurianne Cothenet, Josépha Dirringer, juristes en droit du travail

I. Introduction
I.1. Environnement juridique de l’étude
1.1.1. Principes du droit de la représentativité issus de la loi du 20 août 2008
I.1.2. La négociation collective en matière de droit syndical
I.2. Méthodologie : une étude juridique empirique

II. Modes d’influence de la loi de 2008 sur les pratiques conventionnelles en matière de droit syndical
II.1. Indifférence
II.2 Références
A. Evocations
B. Applications
1. Les conditions d’accès à la qualité de syndicats représentatifs
2. Les prérogatives reconnues aux organisations syndicales
3. Nouvelles conditions de validité des accords
II.3. Incidences
A. La sélection des organisations syndicales dans l’espace et dans le temps
1. La sélection des organisations sociales dans l’espace
2. La sélection des syndicats dans le temps
B. Vers une atténuation de la distinction entre syndicat représentatif/ non représentatif
II.4. Concomitances
A. Légitimation
1. La répartition égale par organisation syndicale représentative
2. La répartition en fonction du nombre d’élus
3. La répartition au prorata de l’audience
4. La répartition au regard de l’effectif et de la règle de concordance
B. Institutionnalisation
1. Le discours de promotion du dialogue social
2. La réalisation du dialogue social : les moyens mis à disposition du dialogue social
3. Du dialogue social à la contamination hiérarchique
C. Autoréglementation ?
1. Dialogue social et démocratie sociale au service de l’autoréglementation
2. La recherche d’articulations idoines

III. Conclusion
Annexe : Les accords étudiés

Cette recherche a été réalisée dans le cadre de la convention d’étude conclue pour l’année 2012 (projet nº2) entre l’Institut de recherches économiques et sociales (IRES) « au service des organisations représentatives des travailleurs » et la Confédération générale du travail (CGT).

Fonction publique territoriale : l’analyse des élections vue par la CGT

Nous remercions Baptiste Talbot, secrétaire général de la Fédération CGT des services publics (collectivités territoriales), la plus grosse fédération de la CGT, de nous communiquer l’analyse très détaillée des résultats électoraux des élections de décembre 2014 sur le secteur.

Nous publions aussi, dans la suite, l’analyse faite par Solidaires Fonction publique, sur les résultats des « trois versants » de la Fonction publique : Etat, territoriales, santé, ainsi que le communiqué de la FSU.

 

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Comité national fédéral des 27 et 28 janvier 2015
Rapport introductif au débat sur les élections professionnelles 2014
Baptiste Talbot

Mes cher-e-s camarades,
Nous sortons d’une campagne électorale qui nous a fortement mobilisés ces derniers mois et nous connaissons donc maintenant les résultats définitifs.
En premier lieu, je tiens, au nom de la direction fédérale, à saluer une nouvelle fois le travail réalisé par nos camarades, à tous les niveaux, pour construire le vote CGT et permettre à notre organisation, dans un contexte difficile, de rester la première organisation syndicale dans la Fonction publique territoriale.
Deux réalités coexistent : d’une part, le caractère massif du vote CGT dans la Fonction publique et notamment dans son versant territorial ; d’autre part, le recul sensible de notre organisation, davantage marqué dans notre versant. C’est autour de ces deux réalités qu’il me semble nécessaire que nous réfléchissions ensemble.
Première réalité donc : la force du vote CGT, un vote de masse
Certes, notre organisation recule de manière sensible, mais elle reste de loin la première organisation syndicale de la Fonction publique avec 23% des voix et 604 624 suffrages, devant la CFDT (19% et 504 804 voix) et FO (18% et 486 857 voix), l’UNSA (10,4% ; +1,1 point), la FSU (7,9% ; -0,3 point) et Solidaires (6,8% ; +0,3 point). La CFTC et la CGC recueillent respectivement 3,3% et 2,9% des voix.
Dans la Fonction publique de l’État, FO totalise 17% (+0,4 point), la FSU 15,6% (-0,3 point), l’UNSA 14,8% (+0,8 point), la CFDT 14% (-0,6 point) et la CGT 13,4% (-2,4 point). Solidaires et la CGC obtiennent respectivement 9% et 5,5% des voix.
Dans la Fonction publique hospitalière, la CGT obtient 31,7% des voix (-1,9 point), la CFDT 25% (+0,6) et FO 23,8% (+1). Solidaires perd 0,4 point à 8,5% et l’UNSA gagne 0,7 point à 5,0%.
Cette réalité de la force du vote CGT est encore plus marquée dans notre versant : la CGT recueille 29,53% des voix, la CFDT 22,33%, FO 17,71%. Avec 291 624 voix, les voix CGT dans la FPT représentent 48% du total des voix CGT dans la Fonction publique. Ils représentent par ailleurs 11% du total des voix recueillies par les organisations syndicales de la Fonction publique : la CGT dans la FPT est l’organisation syndicale qui dans son versant recueille le plus de suffrages dans l’ensemble de la Fonction publique (devant la CFDT dans la FPT avec 220 777 voix et FO dans la FPE avec 189 883 voix).
Encore une fois, rappelons que ces résultats ne sont pas tombés du ciel : ils sont le fruit du travail de nos syndicats, de nos militants, de nos syndiqués. Ils concrétisent le fait que malgré notre recul, la CGT reste de loin l’organisation syndicale de référence dans la FPT.
J’en viens maintenant à un examen plus précis des résultats qui va nous amener à la question de l’évolution de notre score.

Quelques éléments en premier lieu sur la participation et l’évolution du nombre d’inscrits
Le nombre d’inscrits a augmenté de 251 633 (+ 15%) et le nombre de votants de 61 629 (+6%).
La participation a été de 54,9%, en recul de 4,7 points. C’est dans la FPT que la participation reste la plus forte mais c’est aussi dans la FPT qu’elle recule le plus, situation particulièrement préoccupante qui renvoie à d’importantes questions quant à la citoyenneté dans notre pays et à la démocratie sur les lieux de travail.
A noter que dans tous les départements d’Ile-de-France, la participation est inférieure à 50%.
Le développement du vote par correspondance a fortement contribué au recul de la participation. Un seul exemple, celui de la Petite Couronne, où l’on votait à l’urne en CAP en 2008 et où l’on est donc passé au vote par correspondance :
-en 2008, en catégorie B, la participation était de 48%. Elle passe à 35%. Le vote CGT passe lui de 41% à 34%.
-en catégorie C, la participation passe de 48 à 24% et le score CGT de 47 à 41%.
-alors que le nombre de votants recule de 18 446 voix dont 16 826 en catégorie C, la CGT recule de 10 006 voix dont 8 823 en catégorie C.
Ces exemples démontrent le lien très fort entre mode de scrutin et niveau de participation. Ils confirment la justesse de notre bataille pour le vote à l’urne qui demeure le meilleur mode de scrutin, singulièrement dans la FPT. Rappelons qu’en mars 2014, à propos du projet du centre de gestion de la Petite Couronne de passer au vote par correspondance au motif d’économies budgétaires, la Fédération avait écrit à la Fédération nationale des centres de gestion que « le recours au seul vote par correspondance entraînera mécaniquement une forte baisse de la participation ». Une fois encore, la CGT n’a pas été écoutée et l’on mesure les dégâts commis.
Ces chiffres disent aussi la forte corrélation entre le niveau du vote CGT et la participation. Lorsque celle-ci baisse, c’est bien d’abord la CGT qui en pâtit avant tout.
Le vote blanc (4,8%) doit quant à lui nous interpeller sur le degré de reconnaissance des syndicats parmi les agents : pour un certain nombre, ils continuent d’accorder de l’importance à la démocratie sur le lieu de travail mais ne se reconnaissent plus dans les organisations syndicales.

Sur le niveau du vote CGT dans la FPT pour les comités techniques, un rappel historique :
1989 : 33,1%
1995 : 31,7%
2001 : 31,23%
2008 : 32,8%
S’agissant de 2014, nous sommes à 29,5%, soit un recul de 3,4 points par rapport à 2008. Nous avons recueilli les voix de 291 964 de nos collègues, soit 12 750 de moins qu’en 2014 (-4%).
Nous sommes en progression dans 25 départements et donc en recul dans les 70 autres.
A noter, en Lorraine et en Midi-Pyrénées, la majorité des départements sont en progression.
Alors qu’elle dépassait les 50% en CTP dans quatre départements en 2001 et dans 8 en 2008, la CGT est désormais le syndicat majoritaire dans seulement 4 départements (Ariège, Gers, Lot-et-Garonne, Haute-Loire). L’Ariège conserve d’une courte tête la palme du meilleur score national avec 56,94%, juste devant la Haute-Loire (56,77%).
Nous reculons de plus de cinq points dans 27 départements, dont 4 où nous reculons de plus de 10 points.
Un regard est indispensable sur le lien entre syndicalisation et résultats électoraux.
Notre nombre de syndiqués a augmenté de 8% depuis 2008, soit un rythme sensiblement inférieur à celui de l’évolution du nombre d’inscrits (+15%) mais supérieur à celui du nombre de votants (+6%).
Cela dit, un fait doit être relevé : en 2008, notre nombre de syndiqués sous-estimait la réalité de l’implantation CGT dans la FPT puisque des milliers d’agents de la FPT étaient alors encore syndiqués à l’UNSGPEN et à la FD de l’Equipement. Certains comme vous le savez sont toujours organisés au sein du SNPTRI.
Tous les départements dans lesquels nous progressons depuis 2008 sont des départements où nous avons augmenté notre nombre de syndiqués.
A l’inverse, et cela est parfaitement logique, nous reculons en audience électorale dans les 14 départements où nous avons moins de syndiqués en 2014 que nous n’en avions en 2008. La bataille de la syndicalisation n’est pas la seule réponse mais elle est une des réponses clés puisqu’elle est une des conditions de l’extension de notre influence dans les collectivités.
La CGT était première organisation dans 38 départements en 2001. Elle arrivait en tête dans 58 en 2008. Nous sommes premiers dans 52 départements en 2014. Malgré notre recul sensible et un score inférieur à celui de 2001, nous sommes donc premiers dans un nombre de départements supérieurs à celui de 2001 : cela confirme l’impact des nouvelles règles quant aux conditions de dépôt des listes, règles conduisant à la dispersion accrue du syndicalisme dans la FPT.
Concernant les villes gérées par l’extrême droite, 13 ont leur propre comité technique. La CGT a présenté une liste dans 10 de ces villes et réalise des scores encourageants : 21% au Pontet, 23% au Luc et à Béziers, 27% à Hénin-Beaumont, 31% à Cogolin, 33% à Villers-Cotterêts, 44% à Orange, 50% à Hayange, 69% à Beaucaire, 100% à Mantes-la-Ville. La CGT progresse de 3 points à Hayange, 8 points à Béziers, 17 points à Hénin-Beaumont et 26 points à Mantes-la-Ville.
Sur la totalité des 13 villes, la moyenne du score CGT est de 28,5%, 1 point en-dessous donc de notre moyenne nationale. A noter dans ces villes, une présence FO beaucoup plus forte (29%) qu’au niveau national (17%) ainsi qu’une surreprésentation du SAFPT (11% contre 1% au niveau national).
Deux autres résultats doivent retenir notre attention. A Amnéville, où la CGT avait été empêchée de se présenter par le maire de l’époque Jean Kiffer, la liste CGT réalise un score de 63% et engrange ainsi les fruits de la lutte menée ces dernières années. A Nilvange, où le syndicat CGT a été désaffilié en 2011 suite à l’affaire Engelmann, la CGT a pu présenter une liste et recueille 100% des voix, comme en 2008.
Les résultats en CAP sont à examiner de près.
Notons d’abord que la participation, 53,9%, est inférieure d’un point à celle des comités techniques. En 2008, c’était l’exact inverse (60% en CAP et 59% en CTP). Déjà important en comité technique, le recul de la participation est donc supérieur en CAP. La participation est plus forte en A (60%) et en B (57%) qu’en C (52%). Alors que le nombre d’inscrits a augmenté de plus de 130 000, le nombre d’exprimés baisse de 15 000. Cette réalité très préoccupante traduit le malaise grandissant des fonctionnaires territoriaux et questionne fortement leur lien aux organismes paritaires et à la Fonction publique de carrière. Le développement du vote par correspondance a également lourdement pesé dans cette évolution.
La CGT est la première organisation en CAP (28,8%) suivie de la CFDT (20,8%) et de FO (18,5%). Nous reculons de 4 points par rapport à 2008 (32,8%). Nous régressons donc davantage en CAP qu’en CT. Cela se retrouve sur l’évolution du nombre de voix : nous perdons deux fois plus de voix en CAP qu’en CT (33 000 voix en moins, contre 12 000 en CT).
Nous arrivons à 31,8% en C, 23,4% en B et 14,8% en A. Nous sommes premiers en C et deuxième en A et B, derrière la CFDT.
Parce que nous ne disposons pas de résultats officiels par catégorie pour 2008, les comparaisons sont difficiles. A partir des données partielles collectées par la Fédération en 2008, nous pouvons néanmoins estimer le recul à environ 3 points en A et B et à 5 points en C. Là encore, puisque la baisse de la participation est plus marquée en C, le lien entre recul de la participation et recul du vote CGT apparaît clair.
Le décalage entre notre score parmi les fonctionnaires et celui que nous réalisons au niveau des comités techniques doit nous amener à mieux prendre en compte les inquiétudes de nos collègues titulaires et à mieux travailler les questions revendicatives propres aux fonctionnaires.

Concernant les autres organisations, la CFDT est à 22,3% (+0,4 point), FO 17,7% (+0,3 point), l’UNSA 8,2% (+1,9 point) et la FA FPT 7,47% (+0,47%). SUD, avec 3,6% (+0,7 point), dépasse légèrement la CFTC (3,5% ; -1,2 point) et la FSU (3,3% ; +0,2 point). La FGAF est à 1,11% (SAPFT à 0,8% en 2008).
Les différentes organisations autonomes progressent de 2,6 points et représentent désormais 16,7%. Ce syndicalisme qui se revendique apolitique, ce qui est toujours une manière de faire de la politique, continue de progresser dans le versant territorial. Rappelons que les organisations autonomes avaient déjà amélioré leur score global de 3 points en 2008.
Autre enseignement : alors qu’elle colle à la politique gouvernementale, la CFDT parvient à améliorer légèrement son score et à gagner 15 000 voix.
La CFTC est durablement affaiblie dans la FPT et perd son siège au CSFPT et au CNFPT. La CGC, alors qu’elle progresse dans de nombreux secteurs, stagne en nombre de voix et en pourcentage.
Les équilibres au CSFPT n’évoluent pas de manière majeure. Nous conservons nos 7 sièges, ce qui confirme que les règles antérieures conduisaient bien à minorer notre représentation dans les organismes paritaires. Ni SUD ni la FSU n’entrent au CSFPT. La CFTC en sort, comme indiqué précédemment.
Concernant le Conseil commun de la Fonction publique, la CGT perd un siège et en conserve 8. Les grands équilibres sont maintenus et l’on doit surtout retenir qu’avec 30 sièges à pourvoir, hormis les organisations groupusculaires, toutes les OS conservent au moins un siège et donc la qualité d’organisation représentative permettant de participer aux négociations inter-versants.

Quelques pistes maintenant pour l’analyse des résultats à partir des débats de la CEF :

Notre recul apparaît lié à plusieurs facteurs :
– la montée de l’abstention (+4,5 points) d’abord fortement liée au développement du vote par correspondance et qui pénalise en particulier la CGT, notamment pour les instances des centres de gestion.
– les nouvelles règles issues des accords de Bercy en second lieu, qui conduisent à la présence d’un plus grand nombre d’organisations et à une dispersion accrue des votes. En 2008, la CGT demeurait la seule organisation dans un nombre non-négligeable de collectivités. Ce cas de figure s’est fortement raréfié.
– l’état de la bataille idéologique, dans laquelle le discours CGT s’inscrit à contre-courant de la propagande dominante déployée par le pouvoir politique et économique et ses relais médiatiques et syndicaux (c’est dans ce cadre que s’inscrit le récent battage autour des affaires internes à la CGT, qui, sans être le facteur majeur de nos reculs, a de toute évidence eu un effet amplificateur).
– les conséquences des municipales et la poussée de la droite et de l’extrême droite, ainsi que l’hostilité assumée à notre égard de nombreux exécutifs socialistes, situation qui se traduit en particulier par des pratiques patronales favorisant ouvertement des organisations réformistes.
– nos difficultés en termes de vie syndicale avec de fortes carences de vie démocratique dans de trop nombreuses structures, se traduisant souvent par des conflits internes qui entraînent une déperdition d’énergie syndicale au détriment de notre activité. Dans le même ordre d’idée, nous devons être très vigilants sur nos difficultés à mener dans des délais efficaces les nécessaires transformations de nos outils syndicaux en fonction des évolutions des périmètres de collectivité. Dans la même veine, relevons des carences dans la circulation des informations (diffusion de la Lettre du jour aux syndicats, remontée des résultats, etc…), situation dont il nous faut tirer les leçons.
– la nécessité absolue de développer un outil syndical de proximité, notre recul étant d’autant plus important lorsque l’électeur ne dispose pas d’un outil CGT proche de lui. Notre recul sensible dans les instances des centres de gestion est à examiner sous cet angle. Sur un échantillon de 64 CDG, la CGT recule de 7 points entre 2008 et 2014, soit le double de ce que nous perdons nationalement. Cette tendance remet en lumière l’enjeu du nécessaire lien régulier entre l’agent et l’organisation syndicale CGT. Cela doit nous conduire à poursuivre la mise en œuvre de la décision 12 du 10ème congrès fédéral sur l’organisation des syndiqués individuel-le-s.
– un discours et un revendicatif CGT qui doivent mieux relier notre critique de la politique actuelle avec le vécu des agents de la FPT et leurs préoccupations quotidiennes. Ces dernières années, nous avons sans doute eu un discours perçu comme juste par beaucoup mais trop général, trop politique, pas assez connecté à la réalité immédiate de la vie au travail de nos collègues.
-enfin sont venues dans les débats des critiques portant sur des tendances trop répandues à une forme de professionnalisation, de fonctionnarisation, de bureaucratisation, de notre syndicalisme. De trop nombreux militants, bien souvent en responsabilité depuis de longues années mais pas forcément, perdent de vue ce qui constitue le cœur de notre conception du syndicalisme, à savoir l’organisation démocratique des travailleurs pour mener les luttes permettant de faire aboutir leurs revendications.

Des points positifs sont également à retenir :
-de belles progressions CGT au plan local, qui méritent d’être attentivement examinées car elles sont d’autant plus riches en enseignements dans un contexte global de repli. Je vous livre quelques exemples : la CGT devient première organisation à Toulouse, première historique dans ce qui a été longtemps un fief de FO ; la CGT réalisé un score de 75% à Longwy (54) où le syndicat a été créé en juin dernier ; la CGT progresse de plus de 3 points au CG 69, de 7 points au conseil régional de Haute-Normandie ; elle passe de 22 à 45% au conseil général des Yvelines…
-un matériel CGT a priori apprécié, mais nous avons besoin sur ce point d’avoir vos retours à partir du questionnaire fédéral
-un travail croisé avec l’interpro qui a porté ses fruits là où il a été mené
Ces premiers éléments devront être affinés à partir des bilans départementaux réalisés par chaque CSD et par les syndicats. Notre débat d’aujourd’hui va nous permettre de travailler en ce sens.
D’ores et déjà, la question de notre qualité de vie syndicale et, en lien, celle de la formation de nos militants et syndiqués ressortent comme des priorités fortes pour les années à venir. Elles devront être traitées avec ambition lors de notre 11ème congrès fédéral. De même, l’enjeu d’un travail syndical mené prioritairement au plus près des agents est identifié comme un axe déterminant. Il est devenu décisif de savoir cantonner à ce qu’il doit être le temps consacré à notre fonctionnement interne et aux discussions au sein des organismes divers et variés mis en place par nos employeurs.
Parce que nous restons largement première organisation et parce que nous connaissons un recul net, il est certain que nos résultats doivent à la fois nous conforter quant aux fondamentaux de notre démarche et nous amener à engager de nécessaires évolutions. Les prochaines élections se tiendront en 2018. Il est impératif qu’elles conduisent à une progression de la CGT. Cela passera par notre capacité à bousculer nos habitudes, à savoir nous remettre en cause à chaque niveau du local au national, pour être toujours plus à l’offensive sur le terrain de la syndicalisation et des luttes revendicatives.

 

 

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Avec 6,8% (6,6 en 2011) Solidaires Fonction Publique renforce sa présence dans les trois versants. Les chiffres annoncés sont soumis à évolution en raison des annonces non consolidées du versant de l’hospitalière.

Notre organisation se renforce à l’État et à la territoriale malgré une légère baisse à l’hospitalière.

Avec plus de 10 000 voix par rapport à 2011, nous obtenons trois sièges au conseil commun (2 en 2012) !

Une constatation tout d’abord : 52,8% des agents ont participé à ce scrutin historique dans la mesure ou les trois versants votaient le même jour. Ce chiffre de « trop peu » doit nous interroger.

Les difficultés et anomalies, liées aux votes électroniques dans quelques ministères, ne sauraient expliquer à elles seules, ce désintérêt d’une partie des personnels de la fonction publique.

Nos organisations directement concernées par ces dysfonctionnements, ont d’ores et déjà engagé des recours ! Solidaires FP se félicite de son maintien qui valide un syndicalisme de lutte et de proximité.

Nous avons fortement progressé dans nos bastions habituels. Nous apparaissons dans des secteurs où nous étions absents précédemment.

Nos marges de progression restent grandes, notre implantation doit se poursuivre y compris dans des secteurs où nous n’apparaissons pas encore (défense, affaires étrangères). Solidaires produira prochainement une analyse plus détaillée de ces élections après échanges avec l’ensemble nos syndicats qui ont participé, dans leur secteur, à ce scrutin. Pour l’heure, au moment où s’ouvre un nouveau mandat de 4 ans, Solidaires FP s’engage à porter les revendications des agents confrontés à une dégradation des conditions de travail, une baisse réelle du pouvoir d’achat et à la poursuite des suppressions d’emplois.

Les réformes de l’Etat, des territoires, la revue des missions et les négociations PPCR sont autant de thèmes qui méritent de notre part une vigilance de tous les instants.

Nul doute que nous devrons dans l’unité la plus large construire les conditions nécessaires de mobilisation pour contrer de tels projets qui ne vont pas dans l’intérêt des services publics, de la fonction publique et de ses agents.

La confirmation de notre représentativité nous confère la responsabilité de peser pour créer cette dynamique.

 

  • Elections Fonction publique : messages reçus ! Force incontournable, la FSU tirera avec les personnels les enseignements de ces élections (mardi 09 décembre 2014) siteon0
 

Pour la première fois, près de 5 millions de personnels des trois fonctions publiques étaient appelés, le 4 décembre dernier, à élire leurs représentants dans les instances locales et nationales.

La FSU reste la deuxième organisation syndicale de la Fonction publique de l’Etat.

Malgré une baisse du nombre de voix obtenues dans certains secteurs, la FSU confirme largement sa première place à l’Éducation nationale, tout en prenant acte de sa baisse de 5 points, et à l’Agriculture. Elle reste également bien implantée dans d’autres ministères comme à la justice et progresse même à la Culture, à la Caisse des dépôts et consignation ou encore à l’AEFE.

Le taux global de participation est en baisse par rapport à 2011. Ce taux est bien trop faible. Car au final c’est seulement un électeur sur 2 qui a voté !

La FSU remercie les dizaines de milliers d’électrices et électeurs qui lui ont accordé et renouvelé leur confiance à la Fonction publique de l’État comme à celle de la territoriale. Elle salue également toutes les équipes militantes qui se sont dépensées sans compter, notamment pour assurer, dans des conditions parfois difficiles, un taux de participation significatif pour ces scrutins.

A l’heure des bilans, des constats s’imposent. Le contexte économique et social n’invite pas à la confiance et l’espoir en l’avenir et donc n’incite pas les personnels à participer à des élections. Par ailleurs, les modalités de vote (qu’il soit « papier » ou électronique) restent à perfectionner comme la nécessité d’un engagement plus déterminé de l’administration à tous les niveaux.

La FSU engage dès à présent une réflexion sur les signaux qu’envoient les résultats de ces élections. Cela doit interroger le mouvement syndical, la manière dont il arrive ou non à faire partager ses orientations, et les pratiques syndicales qu’il met en œuvre.

Au-delà des seules organisations syndicales, ces résultats devraient aussi interroger le gouvernement. La FSU regrette qu’il n’ait pas suffisamment fait de ces élections professionnelles un grand rendez-vous social pour notre pays. Cela aurait certainement contribué à une plus forte participation. Par ailleurs, en ne répondant pas aux attentes des agents de la Fonction publique, notamment en ce qui concerne les salaires et l’emploi public, il ne les encourage pas à donner corps au dialogue social.

La FSU continuera avec force, avec tous les personnels, à porter la nécessité des évolutions urgentes à mettre en œuvre pour la Fonction publique et à construire les mobilisations indispensables afin d’obtenir des réponses favorables aux exigences et aux besoins de ses agents.

Européennes, FN, syndicalisme : alerte !

Le résultat des élections européennes et le score du FN provoque une série de réactions syndicales, notamment chez les organisations qui s’étaient rassemblées en janvier 2014 pour lutter contre l’extrême-droite (CGT, FSU, Solidaires). Nous les publions ci-dessous : CE confédérale CGT, un tract de Solidaires et une « alerte » du syndicat CGT du bassin minier du Pas-de-Calais.

La CGT, qui se prononce « pour un changement radical de politique« ,  appelle à une journée nationale de mobilisation avec grève et manifestation le 26 juin. Mais rien n’indique à cette heure qu’elle propose de co-organiser cette journée avec d’autres organisations.

  • La Cgt appelle à un changement radical de politiquesiteon0-dc90f

Déclaration de la Commission exécutive confédérale (mardi 27 mai 2014)

Les résultats des élections européennes en France font apparaitre plusieurs éléments extrêmement inquiétants pour la démocratie et le vivre ensemble au niveau national et européen.

Tout d’abord, il convient de noter, à nouveau, une forte abstention puisque 6 électeurs sur 10 ne se sont pas déplacés. Cela confirme, s’il le fallait, le rejet grandissant de la population pour cette Europe des marchés financiers qui conduit à toujours plus d’austérité pour les salariés, les retraités et les privés d’emploi.

Pour la première fois depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, un parti d’extrême droite, le front national, arrive en tête d’une élection. Pour la CGT, ce vote est une impasse. Ce parti utilise la misère sociale, la montée des inégalités et la hausse du chômage pour diffuser, par ses idéaux, le racisme, la discrimination et ne propose que le repli sur soi.

Ce vote de l’extrême, dans de nombreux pays européens, caractérise pourtant la défiance envers les politiques européennes d’austérité qui ne répondent en rien aux aspirations des populations pour un véritable projet européen.

Enfin, par son faible résultat, le parti au pouvoir en place est, une nouvelle fois, désavoué dans ses choix gouvernementaux. Au lendemain des élections municipales, d’un remaniement ministériel, celui-ci a décidé de poursuivre, d’accélérer ses réformes, menaçant l’avenir des jeunes, des retraités, des plus pauvres et octroyant toujours plus de cadeaux au patronat.

Nous sommes devant une crise démocratique grave et profonde qui nécessite de changer totalement les orientations actuelles en matière économique, industrielle et sociale. La CGT, avec la Confédération Européenne des Syndicats, porte un projet européen qui constitue une véritable alternative de sortie de crise et de progrès social.

Ce projet permettrait la création de 11 millions d’emplois en relançant l’économie par un effort important d’investissement de l’ordre de 260 milliards d’euros par an pendant dix ans. Cette somme équivaut à 2 % du PIB européen soit deux fois le budget annuel de l’Union européenne.

Pour la CGT, une autre Europe est possible. La solution pour l’Europe ne réside pas dans les replis nationaux, mais passe par un socle social commun avec un haut niveau de protection sociale, un égal accès à des services publics de qualité, une politique industrielle ambitieuse au service de la croissance, de l’emploi et des salaires.

La CGT oppose à la logique de dumping social faisant du travail un coût, une juste répartition des richesses et pose clairement le problème du coût du capital.

La CGT, avec les salariés, les retraités et les privés d’emploi, s’emploiera à créer les conditions du rapport de force et développera les luttes sociales pour les salaires, l’emploi, les conditions de travail, le service public, la politique industrielle et la protection sociale, car elles sont autant de motifs d’espoir et porteuses d’une transformation sociale.

Les luttes sont nombreuses, c’est quand les salariés s’y engagent, avec la CGT, qu’ils se donnent les meilleurs moyens de les gagner, comme les salariés de SAM technologie en Aveyron ou ceux des Fralib.

La semaine d’action et de mobilisation du 23 au 27 juin sera l’occasion de se déployer sur les lieux de travail, d’aller à la rencontre des salariés sur leurs préoccupations et de mettre en débat nos propositions, avec une journée forte de manifestation et de grève le 26 juin.

Montreuil, le 27 mai 2014

  • Union syndicale Solidaires

La démocratie, c’est prendre nos affaires en mains !
Ainsi, nous ferons reculer efficacement les idées d’extrême-droite
Le récent scrutin pour l’élection au Parlement européen donne lieu à nombre de déclarations, dont beaucoup tiennent plus du commentaire sportif que de l’analyse politique. Le taux de non-participation aux élections politiques est un élément dont il faut tirer des enseignements. Plutôt que de fustiger celles et ceux qui « votent mal » ou qui ne votent pas mieux vaut comprendre pourquoi la dérive vers l’extrême-droite se renforce depuis des années. Le Front National est un parti dirigé par des riches et pour les riches et en défense d’un système capitaliste fût-il national ; il ne fera pas le bonheur des salarié-es, des chômeurs-ses, des retraité-es, des jeunes en formation ; mais de cela, nous devons convaincre nos collègues, nos voisin-es, nos proches…
Des élections, mais combien d’électeurs et d’électrices ?
Une majorité de la population française (57,57% des personnes inscrites sur les listes électorales) n’a pas pris part à l’élection des député-es au Parlement européen1.
En réalité, les pourcentages sont encore plus bas car il faut ajouter celles et ceux qui ne se sont pas inscrit-es sur les listes électorales et les personnes qui résident en France mais ne sont pas d’une nationalité européenne et n’ont pas le droit de vote.
Le mode d’élection aux institutions n’est pas un exemple de démocratie

  •   Les élu-es sont choisi-es par une minorité de la population.
  •   Il n’existe aucun contrôle de leur mandat.
  •   Ils et elles n’ont de compte à rendre que tous les 5 ou 6 ans.
  •   Les institutions en place ne sont pas neutres et servent les intérêts de ceux et celles qui exploitent la majorité de la population.

Quelques explications du désintérêt grandissant pour ces élections :

 

  •   L’affligeant spectacle offert par les multiples scandales financiers qui touchent des responsables politiques.
  •   Les illusions et déceptions renouvelées face à ceux qui se présentent comme candidat-es de gauche et font la même politique que la droite quand ils sont élu-es.

Le Front National recueille les voix de 10,12% des inscrit-es, l’UMP 8,47%, le PS 5,69%, MODEM-UDI 4,04%,EELV 3,64%, Front de gauche 2,58%

  • Le sentiment, porté par les élu-es politiques eux-mêmes, que « ça se décide ailleurs » (selon les moments et les forces politiques : l’Europe, les banques, des « élites » non identifiées, etc.)
  • Le constat qu’élections après élections « rien ne change » si ce n’est en pire dans la vie quotidienne, en matière de chômage, de précarité, de pauvreté, d’inégalités sociales, …

Les politiques gouvernementales successives ont généré une aggravation du chômage, un développement des inégalités sociales, de la précarité, de la pauvreté et de l’exclusion qui n’a fait qu’accroître la désespérance sociale sur laquelle l’extrême droite2 et notamment le FN prospère en surfant sur les peurs et l’anxiété face à l’avenir.
Changeons le système, au lieu de s’en prendre aux électeurs-trices !
Les commentateurs professionnels qui squattent les plateaux de télévision mais aussi la plupart des responsables politiques ont une fâcheuse tendance à limiter leurs analyses électorales à la stigmatisation des électeurs-trices : contre les abstentionnistes, contre celles et ceux qui ont « mal voté »,…
Les résultats électoraux montrent une importante crise du système de représentation. Parce que nous voulons une transformation sociale, une rupture avec le système économique et politique actuel, nous devons inventer la démocratie que nous voulons pour demain.
L’autogestion que nous voulons mettre en oeuvre dans les entreprises et les services ne peut se concevoir sans lien avec la vie de la commune. C’est à partir de celle-ci que doit s’articuler la démocratie, à l’inverse de ce qui se fait aujourd’hui où sont privilégiés les centres de décision éloignés de la population : Commission européenne, état centralisé, métropoles, mégapoles, …
Ne nous enfermons pas dans la défense d’un système qui n’est pas le nôtre mais celui mis en place par la bourgeoisie pour assoir son pouvoir économique et politique ; aujourd’hui, combattre pour la démocratie et donc contre l’extrême-droite qui en est l’antithèse, c’est agir pour un changement profond, y compris du mode de représentation, de la répartition des pouvoirs ou encore de la redistribution des richesses que nous produisons et du choix de celles-ci.
Cela ne doit pas se limiter à des incantations ; il nous faut construire les rapports de force permettant ces ruptures. Ceci passe, à la fois par la prise en compte des questions auxquelles la majorité de la population est quotidiennement confrontée (ce que nous appelons le « syndicalisme de terrain ») et par une présence dès aujourd’hui du syndicalisme sur l’ensemble du champ politique, ce qui est la meilleure garantie d’une véritable autonomie vis-à-vis des partis.
Avec 10,12% des voix des inscrit-es, le Front National arrive en tête

  •   Le Front National progresse par rapport aux élections européennes de 2009.
  • Il n’y a pas de « coup de tonnerre « , mais un résultat prévisible compte tenu :
  • de l’appui aux idées d’extrême-droite apporté depuis des années par une partie importante des représentant-es de la Droite dite « classique »,
  • de l’acharnement du Parti Socialiste à reprendre des thèmes imposés par l’extrême-droite (l’immigration, la sécurité…), à appliquer les politiques d’austérité et de cadeaux au patronat,
  •   du choix de la plupart des forces de Gauche de se positionner en référence au FN au lieu de construire de véritables alternatives.
  • du désarroi des populations laissées dans la misère et l’abandon,
  • de notre incapacité à proposer des alternatives sociales, anticapitalistes, autogestionnaires, écologiques, … crédibles.
  •   Même s’il a plus mobilisé ses électeurs-trices que les autres partis, le Front National recueille un tiers de voix de moins lors de ces élections que pour les Présidentielles de 2012. 2 L’extrême-droite représente un spectre large allant des groupuscules fasciste aux réseaux antisémites Dieudonné et Soral, en passant par le Front National.

Le Front National se fout du Parlement européen !
Le bilan des précédents député-es européen-nes du Front National est lamentable. Mais les dirigeant-es du FN se moquent éperdument du Parlement européen ; la progression du nombre de leurs élu-es (qui serait moindre avec une représentation proportionnelle) leur servira avant tout à toucher plus d’argent et à s’incruster dans les différentes strates du pouvoir à commencer par les « grands médias » où il distillera encore plus ses idées.
Quand l’extrême-droite se lâche…
Le 5 juin 2013, Clément Méric, militant syndicaliste et antifasciste, était assassiné par des militants néonazis à Paris. Odieux et inacceptable en lui-même, ce meurtre, a dépassé le drame individuel. Agressions contre les lesbiennes, bi-es, gays et les personnes trans, contre les immigré-es et les personnes issu-es de l’immigration, les musulman-es, actes antisémites, violences envers des militant-es antifascistes et des organisations progressistes, se sont multipliées ces dernières années et ces derniers mois, dans toute la France comme à travers toute l’Europe, alors que l’extrême droite était banalisée.
Les mobilisations massives contre le droit au mariage pour tous, commencées en 2012, ont été l’occasion de voir se mêler droite et extrême droite dans les cortèges, où les slogans haineux et homophobes contredisaient l’image joyeuse que voulaient donner les organisateurs. Dans le prolongement de ce combat, divers groupes ou mouvements ont vu le jour ou ont pris de l’ampleur (réseaux catholiques traditionnalistes, groupes de jeunes radicaux d’extrême droite, mouvance antisémite et complotiste Dieudonné-Soral…), fers de lance de l’offensive réactionnaire se caractérisant par une occupation de la rue et un activisme idéologique offensif. Un sommet a sans doute été atteint le 26 janvier dernier avec Jour de colère, où on a pu entendre dans les rues de Paris des cortèges qui ne regroupaient pas que des groupuscules néo-nazis crier « juifs hors de France ».
Les responsabilités du syndicalisme dans ce contexte
Il y a un véritable enjeu de formation et d’information pour les organisations syndicales. C’est le sens des débats que nous organisons sur ce thème lors des réunions du Bureau national de Solidaires, qui réunit les représentant-es des syndicats et fédérations de notre Union syndicale. Une formation nationale spécifiquement consacrée à la « galaxie Dieudonné » a aussi été organisée en début d’année. Des initiatives communes CGT/Solidaires/FSU sont organisées (formations, débats, tracts, livres). Mieux armer nos militant-es pour répondre au discours de l’extrême droite qui se répand et se banalise autour de nous, dans les entreprises et les bureaux, lors des tournées syndicales, est une nécessité.
Auprès de salarié-es, nous devons affirmer, sans concession, notre antifascisme, parce qu’il est partie intégrante de notre identité et de notre projet syndical. Sur bien d’autres sujets, nous savons bien que nous devons aussi lutter contre le discours dominant, faire preuve de pédagogie, expliquer sans cesse, et nous le faisons. Alors, il est normal de le faire aussi sur la question de la lutte contre l’extrême-droite.
Notre activité internationaliste est essentielle. Les rencontres européennes des divers réseaux antifascistes sont un cadre de la mise en oeuvre de la solidarité internationale et d’une riposte antifasciste contre la montée des extrêmes droites en Europe. C’est aussi un des axes de travail du réseau syndical international de solidarité et de luttes3. Au plan international aussi, l’antifascisme est partie intégrante de notre syndicalisme !
Il nous faut, aussi et surtout, démontrer aussi que le syndicalisme peut être porteur d’un projet de transformation sociale à la fois utopiste et crédible, que l’unité et la maîtrise des luttes par les salarié-e
sont une force. Le Front National, l’extrême-droite, ne sont jamais à l’aise en période de fort mouvement social et leurs prises de position peuvent alors varier d’un jour à l’autre … Par contre, ils savent que chaque défaite du mouvement social, comme chaque lutte non menée, leur ramèneront de nouveaux électeurs-trices.
Leurs avancées sont faites de nos reculs !

La lutte contre le fascisme ne se limite pas aux enjeux électoraux. Nous avons plus lutté contre la progression de l’extrême-droite et du fascisme en agissant depuis des années au quotidien pour l’égalité des droits, contre l’injustice, pour la sécurité au travail, etc., que ne l’ont fait ceux qui par leurs pratiques décrédibilisent toute action politique au sens large du terme. Et c’est cela que nous devons continuer. C’est là que se mène l’essentiel de la lutte contre l’extrême droite. Au quotidien ; dans la fraternité des luttes où se retrouvent côte à côte français-es et immigré-es, dans le respect du débat démocratique qui s’oppose aux « coups de gueule » et à « la loi du plus fort », dans la prise en charge des problèmes (y compris d’insécurité) pour éviter que leur non-résolution ne tourne au fantasme, etc.
Combattons le sectarisme ! Le syndicat est l’organisation spécifique des travailleurs et des travailleuses. Pour qu’ils et elles reprennent confiance en cet outil, organisons des permanences intersyndicales dans les quartiers, mettons en commun nos moyens pour avoir une présence syndicale forte dans les zones que nous avons abandonné, organisons des réquisitions d’emplois pour montrer qu’il y a des emplois vacants, du travail pour tous et toutes, répondons aux besoins de sécurité, de protection sociale, d’échanges, d’entre-aide, de solidarité… Unifions les collectifs syndicaux de lutte pour être plus fort. Travaillons aux convergences avec les différents mouvements sociaux pour construire des rapports de forces, en France comme en Europe, permettant de gagner contre ces politiques d’austérité au service du patronat et des multinationales. Le combat contre le Grand marché transatlantique (TAFTA, inventé pour les seuls intérêts des multinationales américaines et européennes), peut être gagné sur la base de la défense des droits sociaux et environnementaux, et de solidarité entre les peuples, et contre la concurrence généralisée !
La présence et l’activité syndicales au plus près des travailleurs et des travailleuses (quotidiennement sur les lieux de travail), la reconstruction d’un tissu syndical interprofessionnel de proximité sont des actes antifascistes concrets. Mais pour cela, il faut réellement adapter nos pratiques syndicales à nos ambitions : refuser la multiplication des réunions que les directions inventent pour nous empêcher de faire du syndicalisme, donner plus de temps pour les activités interprofessionnelles, prendre en charge les problèmes de chaque salarié-e, etc.
C’est parce que nous mènerons des luttes victorieuses sur le terrain des droits sociaux et économiques que nous pourrons faire reculer durablement le FN. Partisan d’un syndicalisme de transformation sociale, nous pensons que ce système doit être combattu et radicalement modifié, qu’un autre partage des richesses est une nécessité absolue ! C’est, pour nous, une des façons les plus sûres pour faire redescendre le poids de l’extrême droite au niveau groupusculaire.

 

 

 

  • Déclaration de l’union de luttes des syndicats CGT du Bassin Minier Ouest du Pas-de-Calais
  • Le résultat des élections européennes dans le Bassin Minier Ouest, dans le Pas-de-Calais, dans la Région et en France, est extrêmement inquiétant pour la démocratie et la vie sociale, c’est une alerte.Nous ne pouvons ignorer la forte abstention de ce 25 mai, mais les chiffres comparatifs entre 2009 et 2014 nous montrent que dans la région, le FN a progressé en triplant son nombre de voix. Du rouge, le Bassin Minier, terre historique des luttes de la classe ouvrière, est passé au bleu marine.Bien sûr il y a les bouc-émissaires les plus fragiles, les immigrés et les bénéficiaires des minima sociaux, mais le chômage, la baisse du pouvoir d’achat et l’inquiétude quant aux lendemains difficiles… font le terreau de cette montée inquiétante du FN qui a fait du Pas-de-Calais son laboratoire national.En 2011, notre union de luttes des syndicats CGT du Bassin Minier Ouest avait pourtant sonné l’alerte, c’était à Auchel où l’extrême-droite radicale s’était implantée sous le couvert d’une association. Même si cette alerte antifasciste de 2011 n’a pas eu l’écho nécessaire auprès des élus et partis politiques, enfermés dans un carcan électoraliste, nous avons milité contre les idées nationales-chauvines, xénophobes et racistes de ce parti qui n’est ni démocratique ni républicain ni ordinaire.Le chômage est un fléau et les politiques gouvernementales ne font rien pour le combattre à la racine, refusant catégoriquement des prendre des mesures contraignantes pour le patronat, bien au contraire puisqu’ils font allégeance aux exigences de Bruxelles et au dogme capitaliste européen.Il y a 60 ans, Monnet le banquier et Schumann le réactionnaire, nous promettaient une Europe de la Paix et de la Prospérité, mais avec technocrate Barroso et bientôt avec son successeur Juncker, nous avons hérité d’une Europe de la guerre sociale, du chômage et de l’ultralibéralisme, qui est rejetée par 70% du peuple de France.Le résultat des élections européennes démontre ce rejet massif de l’Europe créée par le grand capital et qui donc ne sera jamais sociale… mentir au Peuple ne sert à rien car il vit la réalité de cette Europe antisociale.Le Bassin Minier Ouest est fortement impacté par le chômage et la misère qui atteint des seuils jusqu’à 60% dans certains quartiers populaires de nos villes. Dans le Nord-Pas-de-Calais, d’où est partie la révolution industrielle qui allait faire de la France la 5ème puissance économique mondiale, 1 million de pauvres, 25% de la population, 370 000 chômeurs soit près de 20% de la population active, et ces chiffres grimpent encore.

    Si ces chiffres étaient étendus au niveau du territoire national, il y a aurait 8.5 millions de chômeurs inscrits à pôle-emploi et 17 millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté, c’est-à-dire 40% de précaires… terrible dans la 5ème puissance économique du monde avec un CAC 40 qui grimpe chaque jour !

    Mais la région compte aussi le plus grand nombre de grandes fortunes, et c’est un paradoxe car nous vivons la même situation de la Ruhr en Allemagne au début des années 1930 qui fût la terre fertile de la montée du nazisme sur fond de corruption, de malversations et de chômage de masse, mais aussi la terre de la résistance organisée contre le nazisme.

    Aujourd’hui, des pans entiers de l’industrie sont menacés dans le Bassin Minier Ouest du Pas-de-Calais, des dizaines de milliers d’emplois sont menacés à très court terme. Cela induit, que nous devons imposer une autre politique et contraindre le patronat, que nous devons par nos luttes et l’unité la plus large, réussir à inverser la courbe du chômage et de la misère, puisque cette alerte du 25 mai est une grave menace sur les prochaines échéances électorales, au niveau du département et de la région, mais aussi pour la présidentielle de 2017.

    Pour la première fois depuis la défaite des pétainistes en 1944 et des nazis en 1945 un parti d’extrême droite arrive en tête d’une élection. Il ne suffit pas de dénoncer, de s’émouvoir ou d’être indignés, il faut résister et faire reculer ce parti qui utilise la misère sociale, les inégalités, le chômage, pour diffuser ses idéaux que sont le racisme, la discrimination, la xénophobie, le nationalisme chauvin qui amènent de fait à l’individualisme et au repli sur soi.

    Pourtant, le président, le 1er ministre, les chefs des partis qui se succèdent au pouvoir depuis trop d’années, bien que désavoués par cette élection, n’entendent pas modifier cette politique d’austérité imposée par l’Europe, ni imposer des lois contraignantes pour empêcher les licenciements.

    Cela veut dire qu’ils acceptent, au nom de la concurrence libre et non faussée et de la réduction d’une dette créée par les cadeaux en centaines de milliards accordés aux capitalistes, la dégradation des conditions sociales et démocratiques, et la montée de la misère et du chômage qui sont le terreau fertile du FN et de l’extrême-droite radicale.

    Nous vivons donc une grave crise démocratique et sociale qui se transforme en une crise de civilisation, ceci impose un changement radical en termes économique, industriel et social… la situation ne peut plus durer ainsi, l’alerte a retenti.

    L’union de luttes des syndicats CGT du Bassin Minier ouest du Pas-de-Calais, appelle les syndicats, les partis progressistes, les associations antiracistes et sociales, les citoyens à s’organiser partout, sans sectarisme ni dogmatisme, contre cette inquiétante montée du F-haine.

    Dans les prochaines semaines, nous convoquerons les syndicats, les partis progressistes, les associations antiracistes et sociales de notre territoire du Bassin Minier ouest du Pas-de-Calais, a une réunion pour organiser collectivement cette résistance au fascisme déguisé, qui est le bras armé du capitalisme… le fascisme ne passera pas ni ici ni ailleurs.

    Réunis à Béthune le 27 mai 2014

    Union de luttes des syndicats CGT du Bassin Minier Ouest du Pas-de-Calais (Auchel-Bruay-Béthune-Lillers-Isbergues)
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Encore sur la CFDT et…le rapport au politique

On ne soulignera jamais assez le contraste entre la CFDT 2014 et celle de hier ou d’avant-hier. Karel Yon, chercheur spécialisé sur le syndicalisme, commente ici un document sur l’intervention CFDT dans les municipales de 1977.

Accès au document CFDT (photocopie) : CFDT-municipales76

Un exemple d’intervention syndicale dans une campagne municipale

Par Karel Yon

Le document que nous présentons ici donne à voir une forme d’intervention syndicale possible dans une campagne électorale. Il s’agit d’une courte brochure de 8 pages éditée par l’union régionale CFDT du Nord-Pas-de-Calais en 1976, à l’occasion des élections municipales de l’année suivante. À cette époque, le discours officiel de la centrale était encore celui de la lutte contre le capitalisme. L’union de la gauche PS-PC n’avait pas encore conquis le pouvoir, mais on espérait cette victoire pour les élections législatives de 1978, les municipales apparaissant comme une première marche vers la conquête de l’État. Et l’on pensait encore que cette victoire pourrait « changer la vie ». C’était la crise, déjà, l’emploi industriel était sévèrement attaqué (particulièrement dans le Nord) et l’austérité était déjà avancée comme la seule politique possible…

Pourquoi ce document conserve-t-il une actualité ?

En premier lieu parce qu’il donne à voir un syndicalisme qui ne réduit pas son action revendicative aux frontières de l’entreprise ou même de l’économie. La mission syndicale est pensée de manière extensive, comme devant prendre en compte tous les besoins, problèmes et intérêts auxquels les travailleurs, peuvent être confrontés. Les revendications ne sont pas nécessairement très radicales, mais elles couvrent un champ de préoccupations qui concernent les travailleurs non seulement sur le terrain de l’emploi mais aussi en fonction d’identités transversales (locataires, usagers des services publics, citoyens, habitants d’un écosystème) et spécifiques (immigrés, femmes). On a là une conception du syndicalisme qui fait écho aux réflexions d’un Bruno Trentin sur la nécessité de représenter le « travail vivant » et non le travail subordonné, tel qu’il est figé dans les catégories dominantes de l’économie capitaliste[1].

Deuxième intérêt de ce document, il manifeste un style d’intervention syndicale dans le champ politique qui se distingue des modalités traditionnelles de soutien à un parti, un individu ou un programme. Ce type d’intervention, on l’a par exemple vu ressurgir à l’occasion des dernières élections présidentielles avec les appels à voter contre Sarkozy et Le Pen ou pour Hollande… avec toutes les déconvenues qui en ont découlé. Ce que le document laisse entrevoir, c’est que ces déconvenues sont peut-être moins liées à l’appel au vote en soi (un syndicat ne se lie pas nécessairement à un parti parce qu’il lui exprime un soutien) qu’à l’absence d’une intervention autonome des syndicats sur le terrain de la stratégie politique. Cette revendication d’autonomie se manifeste aussi par le souci revendiqué de ne pas mettre les luttes entre parenthèses le temps des élections. Il n’est cependant pas question dans la brochure de développer un programme syndical qui soit alternatif à celui des partis. Il s’agit plutôt de présenter une perspective générale, un point de vue syndical interprofessionnel et confédéral informé par une grille de lecture spécifique qui faisait l’identité de la centrale cédétiste à l’époque, celle du socialisme autogestionnaire. C’est dans ce cadre donnant un sens stratégique à l’action syndicale que les syndicats de base sont invités à formuler des revendications concrètes, charge à eux ensuite de les faire valoir auprès des candidats aux élections, voire d’investir des militants pour les représenter sur le terrain des élections politiques. L’autonomie des syndicats est ainsi respectée, laquelle permet dès lors d’ajuster la pratique syndicale à chaque contexte spécifique (degré d’homogénéité sociale et/ou politique de la section, degré d’ouverture du milieu partisan local), mais dans un cadre stratégique qui donne un sens globale à l’action syndicale, celui de la lutte contre l’exploitation et l’oppression capitalistes. La fameuse « double besogne » codifiée dans la Charte d’Amiens ! Il serait bienvenu que cette réflexion renaisse dans les rangs syndicaux : pourquoi militons-nous ? Où allons-nous ? La « démocratie sociale » est-elle une alternative satisfaisante au socialisme, à l’autogestion ? Si non, qu’avons-nous d’autre à proposer ?..


[1] Bruno Trentin était un dirigeant syndical et intellectuel italien très écouté. Il a systématisé ses analyses dans un ouvrage publié en Italie à la fin des années 1990 et récemment traduit (Trentin, La Cité du travail. La gauche et la crise du fordisme, Paris, Fayard, 2012). Il y critique la « subordination culturelle » de la gauche à la raison taylorienne et fait de la lutte contre la réification du travail le cœur du combat syndical, ce qui passe notamment par une démocratisation réelle de la sphère productive.